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Lunetterie : un secteur tourné vers l’écologie ?

Temps de lecture : 6 minutes

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Accessoire qui suit les modes, fabriqué à partir d’un assemblage de plusieurs éléments non conçus au même endroit, tout ou en partie remboursable, rien ne prédestinait les lunettes écologiques à exister. Pourtant, dans le petit monde de l’optique, au sein d’une opinion publique globale qui s’inquiète grandement de la tournure que prennent certains événements, on n’échappe pas à la règle. Car des solutions existent. L’optique-lunetterie se tourne vers l’écologie, de plusieurs manières.

 

Des matériaux naturels : oui, mais…

 

Nous avons déjà, à plusieurs reprises, évoqué l’utilisation de nouveaux matériaux, naturels et respectueux de l’environnement dans nos articles. Bien entendu, c’est une démarche qui va dans le bon sens.

 

Mais si la fabrication écologique de la structure d’une monture optique est clairement démocratisée, il n’en est pas de même pour tous ses éléments, notamment les charnières par exemple, bien souvent fabriquées en Chine, et donc soumises à de lourds et polluants transports de marchandises.

 

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Nombre de fabricants tentent de se diriger vers des solutions locales afin de réduire ce déficit qui nuit encore à la fabrication de lunettes vertes.

 

C’est le cas de Sébastien Bétend, Opticien à Bron, près de Lyon, dont la boutique est presque entièrement équipée de manière écologique, des stylos en passant par le sol et les haut-parleurs.

 

Sa démarche, maintes fois récompensée par la Ville de Lyon, lui a permis d’obtenir le label Lyon Ville Equitable et Durable. Une charte impose notamment aux marques de réaliser la majeure partie de leurs montures en France, contrant ainsi le faux Made in France (la loi n’impose en effet que la fabrication d’un seul élément pour obtenir ce label.)

 

En 2014, Sébastien lance sa propre collection de lunettes écologiques, OpSB.

 

Cependant, utiliser des matériaux naturels peut-il être considéré comme vraiment écologique ? Rien qu’en France, plusieurs dizaines de millions de paire de lunettes sont vendues chaque année, et en imaginant qu’un jour plus aucune d’entre elles ne soit fabriquée avec du plastique, cela équivaudrait à épuiser bien plus de ressources naturelles qu’actuellement !

 

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En consultant les chiffres, vendre 13 millions de lunettes par an équivaut à :

  • Produire 13 millions d’emballages plastiques et de suremballages
  • Fabriquer 26 millions de verres (sachant qu’il faut 30L d’eau pour tailler 2 verres soit 390 000 mètres cubes d’eau)
  • 26 millions de calibres de présentation
  • 48 tonnes de mouchoirs papiers pour essuyer les verres (sur une base de 3 par verre)

 

De plus, pour fabriquer une monture en acétate, seule 20% d’une plaque est utilisée car il s’agit d’une matière qui se dégrade extrêmement vite.

 

Recyclage et fin de vie

 

Alors, que faire ? Un bon moyen de répondre à cette problématique, c’est bien sûr l’occasion !

 

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Certains opticiens ont même trouvé dans cette parade un excellent moyen de se mettre en avant, car il n’y a pas que les montures qui peuvent avoir plusieurs vies.

 

Ainsi, David Benhaim, opticien dans le XIème arrondissement de Paris, a crée un magasin entièrement durable, et pas seulement car il recycle les montures pas ou peu utilisées.

 

Dans sa boutique, des lunettes au mobilier, en passant par les outils, tout est recyclé. En chinant, il a pu mettre la main sur des modèles datant des années 50 auxquels il a su redonner vie, pour un budget moyen de 150 euros.

 

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Dans le même ordre d’idée, Dan Alcabes, dont le magasin est lui aussi situé à Paris, mais dans le Xème arrondissement, a fondé Dingue de Lunettes. Se promenant également dans les allées des brocantes, il restaure à la main des lunettes datant de toutes les époques.

 

Le succès est au rendez-vous, et c’est bien souvent grâce à la volonté de la part des clients de porter des lunettes non seulement uniques, mais respectueuses de l’environnement.

 

Pour ce qui est de la fin de vie des lunettes, très souvent courte car soumise aux aléas de la mode, là encore, de nombreuses solutions de recyclages ont été envisagées.

 

Les paires de lunettes peuvent être recyclées de manière solidaires, grâce aux ONG spécialisées.

 

L’association Lunettes Sans Frontière collecte montures et verres pour les redistribuer aux personnes en difficulté. C’est également le cas du Medico Lions Club de France qui récupère chaque année près de 100 000 paires de lunettes, les recycle et les expédie à travers le monde.

 

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Des collectes rendues possibles par la sensibilisation effectuée par les opticiens, et qui s’inscrit dans une démarche sensiblement écologique autant que solidaire.

 

Le site MyBinocle a lancé le premier site de dépôt-vente optique. Il est ainsi possible de mettre en vente sa paire de lunettes via une petite annonce ou de la confier à un opticien MyBinocle qui révisera, nettoiera et expédiera la paire de lunettes vendue.

 

Pour bénéficier de plus d’informations, retrouvez sur le blog notre article sur la seconde vie offerte aux lunettes.

 

Se faire accompagner, un bon moyen de faire le point

 

On l’a compris, porter des lunettes écologiques ne signifie pas seulement porter des lunettes en bois, en liège, à base d’algues ou autres matériaux verts.

 

Non, c’est toute une démarche qui doit être initiée par les verriers, lunetiers et opticiens. Voilà qui complique la situation à bien des égards !

 

En effet, il est bien difficile de s’improviser fabricants ou revendeur écolo si on n’a pas imaginé toutes les démarches à mettre en œuvre pour réellement faire la différence.

 

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Bien souvent, un accompagnement complet est nécessaire. C’est ce que propose le site Les Lunettes Écologiques, concept lancé par une opticienne expérimentée, bloggeuse et influenceuse, Carole Riehl.

 

Les Lunettes Écologiques accompagnent les opticiens selon leurs besoins et leurs envies de s’engager dans une démarche écologique.

 

Le coaching prend en compte tous les aspects nécessaires pour devenir un opticien éthiquement engagé : de la gestion des déchets du magasins en passant par les propositions faites aux clients, les marques avec lesquelles s’engager…

 

Trois formules sont à la disposition de l’opticien dont la plus complète dure six mois et propose de faire un bilan carbone du magasin, l’établissement des objectifs, l’approche à envisager avec les fournisseurs, le slowmarketing et bien d’autres concepts pour être labellisé comme opticien écologiquement engagé.

 

La digitalisation : une solution ?

 

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Dans un monde numériquement en pleine mutation, il existe encore des freins à la digitalisation : l’investissement financier, la rigidité organisationnelle ou encore le déficit en connaissances numériques.

 

À la suite d’une table ronde organisée par les opticiens Atol, on a constaté une certaine réticence dans des métiers où l’humain est grandement privilégié.

 

La digitalisation ne comporte pas moins un certain nombre d’avantages : contact prolongé avec le client, précision dans les prises de mesures, expériences clients immersives ou encore des outils d’aides à la vente performants.

 

Bien entendu, l’EDI offre des solutions durables pour toute la chaîne logistique des métiers de l’optique.

 

L’explosion attendue des lunettes connectées risque également de changer drastiquement notre façon de porter des lunettes, que ce soit au niveau de leur fabrication, de leur utilisation mais aussi de leur renouvellement.

 

Au niveau digital, l’épatante modernité nous emmène donc vers des sphères encore inconnues à l’heure actuelle.

 

L’éco-responsabilité, d’abord une démarche transparente

 

Pour favoriser une démarche toute écologique dans le monde de l’optique, il est indispensable, dans un premier temps, de faire preuve de transparence.

 

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La remise en cause du marché est aussi essentielle : doit-on continuer à proposer les offres multi-équipements, les secondes paires à prix très réduits alors que le besoin du client à ce niveau n’est pas toujours identifié ?

 

Doit-on se diriger vers une démarche locale ou biologique ? Quelles sont les priorités qui auront à la fois un impact positif sur l’environnement mais aussi sur le marché en lui-même ?

 

Le boom des lunettes écologiques va clairement dans la bonne direction, mais il reste tant de questions en suspens, et surtout beaucoup de travail à effectuer, qu’on devrait en entendre parler à de nombreuses reprises dans les prochaines années…